Une illustration du principe de loyauté des débats – Cass.com, 24 sept. 2015, n° 14.29.169

02/11/2015

De la même façon qu’un maçon ne construira pas sa maison sur des sables mouvants, on ne construit pas une défense à un procès sans un minimum de loyauté.

L’obligation de loyauté dans le procès s’exprime dans le respect du principe du contradictoire ou de l’interdiction de dire tout et son contraire, comme l’illustre le principe de l’estoppel.

Dans un arrêt de la Cour de cassation du 24 septembre 2015 publié au bulletin (n° de pourvoi : 14-23.169), la 2ème chambre civile a eu l’occasion de rappeler que les parties au procès ne peuvent cacher leur identité ou leur adresse.

Les faits :
Au cas d’espèce, l’une des parties, l’appelante, avait changé son siège social sans toutefois en faire la modification ni au registre du greffe du tribunal de commerce ni dans les conclusions qu’elle déposait devant la cour d’appel.

L’appelante soutenait que certes l’adresse du siège social qu’elle mentionnait était erronée mais cela n’avait pas d’importance dans la mesure où les actes de procédure étaient notifiés au domicile du gérant et que donc son adversaire ne justifiait pas d’un grief que lui causait cette irrégularité.

La question posée :
Selon l’article 961 du code de procédure civile selon lequel les conclusions ne sont pas recevables tant que les indications concernant l’identité, le siège social et l’organe qui représente une société n’ont pas été fournies.

Cette irrecevabilité est-elle réellement sanctionnée ou est-elle soumise à la preuve d’un grief subi par la partie qui l’invoque ?

La solution :
C’est sur ce fondement que par son arrêt du 24 septembre 2015, la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel de Toulouse : «… l’irrecevabilité des conclusions d’appel d’une société qui mentionne un siège social fictif n’est pas subordonnée à la justification d’un grief causé par cette irrégularité… ».

Observations :
La solution est classique, la même chambre de la Cour de cassation avait eu l’occasion de rappeler le 12 février 2004 (bull. civ. II, n° 59) la même solution de même que la question de la conformité à l’article 6-1 de la CEDH avait été évoquée par la Cour de cassation dans un arrêt de la même chambre du 14 octobre 2004 (bull. civ. 32, n° 459).

On peut relever également que l’article 1837 alinéa 2 du code civil, mentionne que si « les tiers peuvent se prévaloir du siège statutaire de la société, celui-ci ne leur est pas opposable par la société si le siège réel est situé en un autre lieu ».

La morale :
Rien ne sert de tricher, il faut partir à point.