Le CDD, nouveau salarié « protégé » ?
Les évolutions normales et courantes de la vie de l’entreprise peuvent conduire l’employeur à devoir modifier les conditions de travail des salariés. Il peut s’agir par exemple de l’organisation du travail (horaires pour les salariés à temps complet), de missions confiées (évolution des tâches dans la même qualification et sans impact sur la rémunération) ou encore du lieu de travail (qui peut être modifié dans la même zone géographique).
Juridiquement, ces évolutions s’imposent au salarié, sous réserve des salariés protégés, titulaires de mandats de représentation du personnel ; dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur notifie les nouvelles conditions de travail au salarié, qui doit les respecter. Ainsi, la jurisprudence juge de façon constante que : « le changement d’horaires consistant dans une nouvelle répartition de l’horaire au sein de la journée, alors que la durée de travail et la rémunération restent identiques, constitue un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l’employeur. »[1]
Nul besoin de signer un avenant au contrat de travail, qui ne s’impose que lorsqu’un élément essentiel du contrat de travail est modifié.
Parfois, le salarié refuse ses nouvelles conditions d’emploi. En ce cas, le refus du salarié est susceptible de constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, si la modification des conditions de travail souhaitée par l’employeur était légitime et justifiée. En revanche, « le refus par le salarié d’un changement de ses conditions de travail ne constitue pas une faute grave »[2]. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise[3]. Or, le maintien temporaire du salarié, pendant la durée du préavis, est généralement possible à ses anciennes conditions de travail.
Fort logiquement, la Cour de cassation applique la même solution aux CDD que celle retenue pour les CDI, et en déduit, pour la première fois dans deux arrêts du 20 novembre 2013 (n°12-30.100 http://bit.ly/LLAhbm ), que le salarié sous CDD qui refuse l’évolution de ses conditions de travail commet bien « un manquement à ses obligations contractuelles », mais qui ne constitue pas une faute grave… avec la conséquence spécifique en découlant, que l’employeur ne peut rompre de façon anticipée le contrat à durée déterminée du salarié qui a refusé ses nouvelles conditions d’emploi. Pour mémoire, « Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave ou de force majeure. » (article L. 1243-1 du code du travail).
Ainsi, les nouvelles modalités de fonctionnement de l’entreprise pourront être opposées aux salariés en CDI, qui se verront licencier en cas de refus et si l’employeur entend maintenir l’évolution des conditions de travail ; le salarié en CDD au contraire restera en poste et à ses anciennes conditions dont il refuse l’évolution ! Tout au plus pourra- t-il être sanctionné…