CEDH : lorsque la liberté d’expression fait (encore) face à la censure
L’injonction judiciaire obligeant une entreprise de presse à retirer des enregistrements illégaux de son site internet n’est pas contraire à la liberté d’expression.
Dans un arrêt en date du 14 janvier dernier, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) est venu résoudre un long conflit opposant les droits à la liberté d’expression au respect de la vie privée, dans le litige opposant Mediapart au gouvernement français.
A l’origine, les faits portent sur la publication d’enregistrements clandestins de Mme Bettancourt, publiés par Médiapart sur son site internet, entre mai 2009 et mai 2010.
Par un arrêt du 4 juillet 2013, la Cour d’appel de Versailles avait ordonné le retrait des publications litigieuses avec injonction de ne plus publier tout ou partie des enregistrements illicites réalisés au domicile de Mme Bettencourt.
La Cour de Cassation, le 15 janvier 2015, avait affirmé que l’atteinte à l’intimité de la vie privée de Mme Bettencourt, « que ne légitime pas l’information du public » était constituée, par le fait que les enregistrements publiés l’avaient été au domicile de Mme Bettencourt, à son insu et en pleine conscience de leur origine illicite.
Devant la CEDH, les journalistes invoquait que cette injonction judiciaire les obligeant à retirer du site du journal Mediapart la publication de ces extraits portait atteinte à leur droit à la liberté d’expression, au soutien de l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme.
Si le gouvernement français a admis que cette condamnation, prévue par la loi française, constituait une ingérence dans l’exercice de leur droit à la liberté d’expression, la Cour a indiqué que celle-ci « poursuivait le but légitime de la protection de la réputation ou des droits d’autrui ».
Elle a ainsi relevé que « les publications litigieuses provenaient d’enregistrements réalisés à l’insu » de la personne et « qu’un tel procédé, indépendamment des éléments constitutifs de sa répression par la loi française, constituait à n’en pas douter une intrusion suffisamment grave pour faire entrer en jeu leur droit au respect de la vie privée au titre de l’article 8 de la Convention ».
En statuant que la France n’avait pas violé les principes de la liberté d’expression en faisant censurer 70 articles de presse, la CEDH a rappelé que « les journalistes qui exercent leur liberté d’expression assument « des devoirs et des responsabilités » ». Elle rappelle alors « que le paragraphe 2 de l’article 10 ne garantit pas une liberté d’expression sans aucune restriction, même quand il s’agit de rendre compte dans la presse de questions sérieuses d’intérêt général ».
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Par l’équipe IP/IT du Cabinet UGGC