Les heures de délégation, ce n’est pas pour aller à la pêche !
Par Marine Chimisanas et Sophie Uettwiller
Le code du travail prévoit des crédits d’heures de délégation pour les élus titulaires des comités d’entreprise et CHSCT et les représentants désignés par les syndicats, variant de 2 heures à 20 heures par mois, en fonction du mandat et de l’effectif de l’entreprise. Ces heures sont cumulables pour les salariés détenant plusieurs mandats, sous réserve de certaines limites, notamment pour les salariés à temps partiel[1].
Par principe, et dans la limite du crédit d’heures accordé, les heures de délégation sont de plein droit considérées comme du temps de travail, que l’employeur doit payer à l’échéance normale.[2]
Pour autant, les heures de délégation doivent être effectivement utilisées pour l’exercice d’une activité conforme à l’objet du mandat dont est investi le salarié.
L’employeur peut ainsi remettre en cause la présomption de bonne utilisation des heures de délégation.
Pour ce faire, l’employeur doit, préalablement à l’action en contestation sur le fond, et toujours après paiement des heures (hors heures exceptionnelles) demander au salarié de lui fournir l’indication des activités auxquelles ont été consacrées ses heures de délégation.
A ce titre, le salarié ne peut se contenter de :
- répondre qu’il a utilisé ses heures de délégation dans le cadre de son mandat, sans apporter aucune précision sur les activités exercées dans un tel cadre.[3]
- fournir des imprimés portant outre les mentions manuscrites de dates et de nombre d’heures de délégation, des mentions rédigées à l’avance, sans précision sur la nature des activités exercées.[4]
Si le salarié refuse de répondre ou si ses réponses sont jugées insuffisantes, l’employeur peut alors saisir le juge des référés pour obtenir des précisions sur les activités auxquelles ont été consacrées les heures de délégation.[5]
Attention : si l’employeur peut obtenir des indications sur l’utilisation du crédit d’heures, il ne peut demander au salarié la justification de cette utilisation ! Concrètement, cela signifie qu’il n’incombe pas au salarié d’apporter la preuve des activités qu’il indique avoir exercé… Nous restons en France, quand même !
Au final, l’employeur pourra solliciter devant le conseil de prud’hommes le remboursement des sommes versées au titre des heures de délégation s’il dispose d’éléments permettant de justifier que l’activité exercée par le représentant du personnel n’est pas conforme à son mandat.
Plus encore, de telles actions – menées à bon escient – décrédibilisent durablement le représentant du personnel qui a utilisé ses heures de délégation à des activités purement personnelles… comme cela arrive parfois !